Site officiel de la Confrérie de la Gaufre Liégeoise
"La Strème"

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Etymologie

Le mot gaufre vient de "walfre" du 12e siècle. En vieux français, wafel qui signifie "rayon de miel"

C'est une pâtisserie de pâte légère, cuite entre deux fers qui y impriment un dessin en relief. En wallon, gaufre se dit "wafe" à Liège, "galèt" à Huy, Amay, Bergilers, Oleye . Si nous consultons le dictionnaire "Dialecte Wallon de Liège" de Jean Haust, nous apprenons que le mot "strème" se traduit en français par "étrenne" dans les diverses régions de notre belle province de Liège et notamment à Glons , en Hesbaye et en Condroz liégeois (Tavier - Strée) comme à Malmedy

Les ancêtres des gaufres

L'ancêtre de la gaufre n'est pas autre chose que la rustique galette de bouillie de céréales que la cuisinière du néolithique faisait cuire sur une pierre chaude. Lorsque la partie en contact avec la pierre était bien dorée, elle retournait la galette pour faire cuire l'autre face. Il y a des gestes intemporels. Quand on eut l'idée de substituer à la pierre une plaque de fer, la crêpe fut inventée. Et lorsqu'on imagina, pour gagner du temps, de saisir la galette entre deux plaques de fer chaudes, on assista à la naissance de la première gaufre. C'était il y a bien longtemps, le mot gaufre n'existait pas encore. Les historiens de la gastronomie nous apprennent que ce sont les anciens Grecs - selon Athénée de Naucrate en Egypte qui écrivit en l'an 200 de notre ère - qui ont perfectionné la technique de cuisson. Ils étaient, en effet, fort habiles dans la fabrication de certains petits gâteaux cuits dans des moules composés de deux plaques de fer et appelés "obelias" ou "obelios".

C'est donc au 13e siècle que les gaufres proprement dites ont fait leur apparition. On les doit au

forgeron qui imagina le premier de fabriquer des moules -ou plutôt des fers- à oublies en copiant le dessin alvéolé des rayons de miel qu'élaborent les abeilles. Le nom des oublies fabriquées avec ce type de fers était tout trouvé : gaufre, du latin "gafrum" ou du vieux français "wafla" ou "wafel" qui désigne ces fameux rayons de miel extraits des ruches. Le grand-d'Aussy* rapporte que l'usage des gaufres remonte au XIIIe siècle car on en trouve le nom dans des poèmes manuscrits de cette époque. Les gaufres se vendaient au peuple dans les rues. Aux jours de fêtes religieuses et au Mardi gras, les marchands de gaufres, moyennant une honnête rétribution qu'ils payaient au clergé, s'établissaient à la porte des églises avec ce qui était nécessaire pour faire et pour cuire ces denrées. Ils les vendaient chaudes. Cela dura jusqu'au jour où le roi, Charles IX, en eut assez de voir les marchandes de gaufres en venir aux mains, se disputant les places parce qu'elles étaient d'année en année de plus en plus nombreuses : les marchands seraient obligés d'être distants l'un de l'autre pour le moins de deux toises (ancienne mesure de longueur valant 1,949 m).

* Pierre Jean-Baptiste Le grand-d'Aussy : érudit français né à Amiens, mort à Paris (1737-1800)

Le 16e siècle 

Qu'il s'agisse d'oublies ou de gaufres, il fallait des fers pour les fabriquer. Les gaufres n'étaient pas seulement une friandise. Il arrivait qu'on en mange lorsqu'on manquait de pain. Ainsi, elles étaient seulement faites d'eau et de mauvaise farine. Les gaufres sont devenues un "ragoût" fort prisé de nos paysans (d'après Champier), ragoût composé d'une pâte liquide formée d'eau, de mauvaise farine (ou sarrasin, châtaignes, glands) et de sel. On le versait dans un fer creux, à deux mâchoires préalablement frotté d'un peu d'huile de noix, puis chauffé sur le feu pour cuire la pâte. A partir du XVIIIe s., la mauvaise farine sera parfois remplacée par des pommes de terre. Ces gaufres populaires étaient très épaisses tandis que celles des classes aisées étaient plus minces et surtout plus délicates, car on y ajoutait des œufs, du lait, du miel… (toutes les recettes actuelles y compris les gaufres salées au lard).

Historique de la gaufre liégeoise

L'évolution du fer à gaufre

A partir du XIIIe s., les fers, non bordés, comportent deux longs manches avec ouverture en X, ils sont transversaux par rapport à l’axe des manches. Au début du XIXe s., les fers, bordés, sont parfois dans l’axe des manches, la charnière se trouvant au sommet des fers; vers le milieu du siècle, elle est latérale, dans l’axe des manches. Du 13e au XIXe s., tous les fers sont décorés soit de quadrillages, soit de motifs divers (religieux, héraldiques, mythologiques, historiques, etc.) Au XXe s., les manches raccourcissent, l’ouverture est latérale ; les fers deviennent "électriques". Aussi performants qu’ils soient, avec leur thermostats et leurs revêtements anti-adhésifs, ils nous laissent parfois la nostalgie des gaufres d'antan.

Coutumes

La ménagère qui allume le premier feu de l'année dans le fourneau criera à voix haute "D'ji v' sohête ine bone annêye, al wâde di diu" (Je vous souhaite une bonne année, à la garde de Dieu). Elle se rendra ensuite au puits dans la cour de la ferme et avant d'y puiser le premier seau d'eau, elle répétera les mêmes paroles. Le paysan entourera d'une torchette de paille le tronc des arbres fruitiers en émettant le même souhait. Quel rapport avec la gaufre ? Les bateliers de l'Ourthe feront le signe de la croix sur l'eau avec un morceau de pain (ou de gaufre ?), en disant "Ki l'bon Diu èt l' Ste Vièrge mi présèrvent di tot mâlheûr èt d'tot accidint, mi èt tot mès djins" (Que le bon Dieu et la Ste Vierge me préservent de tout malheur et de tout accident, moi et tous mes gens). Autrefois, il était de coutume pour le jour de l'an d'offrir une gaufre pour les étrennes. Elle se distribuait à l'envi. Fabriquées en famille, elles étaient faites à la cannelle et au sucre candi, différentes, selon les régions, par la forme comme par la grandeur. Il est de coutume de donner une forme de croix au premier galet (galèt = mot wallon pour gaufre dans la région hutoise) sorti du fer. Il est bon de savoir que la gaufre est de tradition au Carnaval.

La gaufre dans nos régions

Si elle trouve son origine dans une coutume calendaire, la gaufre se trouve aujourd'hui tout au long de l'année chez les boulangers ou dans les supermarchés. Les gaufres sont inséparables du monde de l'enfance et du temps de la fête. Mais les gourmands d'aujourd'hui, qui mordent à belles dents dans ces gâteaux si semblables à des rayons de miel, en se riant de la chaleur qui brûle leurs doigts voire des moustaches de sucre glace qui leur poussent, savent-ils que les gaufres comptent parmi les plus anciens desserts ? La capitale du plateau de Herve était réputée pour ses gaufres. Elles avaient un goût de cannelle prononcé. Elles étaient plus grandes et carrées, avec de gros trous. Des femmes descendaient du train à Fléron puis dégringolaient le chemin qui mène à Bouhy pour aller vers la vallée de la Vesdre vendre leurs produits par douzaine ou demi-douzaine. Elles avaient de grands paniers qu'elles portaient sur la tête ou aux bras. A Aywaille, dès le mois de juillet, les marchands vendaient des galettes fourrées aux cerises, aux prunes ou à la confiture en criant : "A deûs çanses èt d'mey lès galèts d'Ewaye !" Omer Marchal dit que ces grosses galettes à vingt-huit ou à trente-deux trous, pétries à la pâte à pain, truffées de demi morceaux de sucre, sont à tremper dans le café parce que, au bout d'une seule nuit, elles sont dures comme de la pierre. Leur cuisson occupe toute la veillée. La mère a mis la pâte dans le coffre du feu en même temps qu'elle a dressé la table pour un rapide souper. Elle graisse le fer avec une couenne de lard trempée dans la vieille tasse de saindoux. En Hesbaye et dans le Condroz liégeois, la première gaufre prenait la forme d'une croix. Elle était réputée incorruptible pendant l'année en cours. Placée sur la tablette de la cheminée, elle devenait un gage de bénédiction. En Ardennes, les gaufres se cuisaient avec un fer à 5 trous sur 8 tandis que dans le Brabant wallon, le fer à grosses mailles était employé.

Aujourd'hui

Les gaufres ont toujours des appellations locales : "wafes", "galets" et "galettes". Il y en a de différentes espèces : les grosses gaufres, les fines gaufres, les gaufres molles, les gaufres en pâte feuilletée, les gaufres de chasse, les gaufres de saison aux fruits frais (cerises, prunes, myrtilles) - les quatre-quarts. Nous savons que souvent, on fait peu de différence entre "li wafe" et "li galêt" ; toutefois, nous croyons qu'il y en a une, comme entre "li galêt" et "li galette". Interprétant le sentiment populaire, nous pensons que le galet serait la gaufre rectangulaire, de toute l'étendue du fer à gaufres, mais plus fines que la gaufre, faite à la vanille au lieu de cannelle ; au sucre blanc au lieu de sucre candi. La galette serait une réduction du galet, plus plate, soit ronde, soit ovale, et de qualité extra.

Comment les différencier ?

La gaufre liégeoise comporte de la cannelle et s'apprécie tiède. Il faut savoir que la gaufre au sucre (sucre perlé) est appelée à tort "gaufre de Liège". Son vrai nom est la gaufre de chasse. Mais ce qui fait la grande différence entre la distinction des gaufres de Bruxelles, de chasse et la gaufre liégeoise, c'est le nombre de trous et l'écartement entre ceux-ci.

Les fers à gaufre mis à la disposition des ménagères contemporaines, comportent 28 trous.
Les gaufres de Bruxelles en ont 20, La gaufre liégeoise et la gaufre de chasse : 24.

Et comment les différencier ? La gaufre de Liège se présente généralement sans les 4 coins.

La bibliothèque gastronomique
L'historique de la gaufre nous a permis de retrouver de multiples recettes allant de la galette fine à la grosse gaufre couverte de grains de sucre en passant par la gaufre molle appelée tout simplement la gaufre liégeoise. Le tableau de Pierre Breughel l'Ancien, le Boeren-Brueghel, intitulé "Combat de Carnaval et de Carême", fut peint vers 1560 et représente entre autres une femme occupée à cuire des gaufres. Cette oeuvre est visible à Vienne, au Kunsthistorishes Museum.


Sources

Nos remerciements particuliers à Monsieur Charles-Xavier MENAGE, bibliothécaire au Musée de la Gourmandise à Hermalle-sous-Huy
•Formulaire de Recettes Belges par Guy Laurent (seul exemplaire connu donnant 41 recettes de gaufres dont 3 de Liège).
•Douceurs Wallonnes et Flamandes de Gaston Clément
•Guide du Visiteur (Musée de la vie wallonne)
•Dictionnaire - Académie des gastronomes
•Decorative Antique Ironwork par Henry René D'Allemagne (New York)
•Les mots d'origine gourmande par Colette Guillemard
•Méthode de cuisine par Marie Delcourt
•Vocabulaire des boulangers, pâtissiers, confiseurs, etc.. par Charles Semertrier
•Magnèdjes di manèdjes (cuisine familiale au fil de l'Ourthe) de Joël Thiry
•Les bons métiers des meuniers, des boulangers et des brasseurs de la cité de Liège par René Van Santbergen
•Almanach historique de la Gastronomie française de Christian Guy
•Petits métiers et cris des rues au pays de Liège - Michel Elsdorf
•La Gastronomie populaire en Wallonie - Collection Contributions au Renouveau du Folklore en Wallonie
•Les Cris des marchands de comestibles en Wallonie - Collection Contributions au Renouveau du Folklore en Wallonie
•Aux Délices de ces Dames - Henri Chavée
•La cuisine régionale wallonne - guide mosan
•Dialecte wallon de Liège - dictionnaire Jean Haust
•Coutumes culinaires au Pays de Liège - Luc Ullus - Fernand Nathan
•Gastronomie wallonne d'hier et d'aujourd'hui de Jean Delahaut
•Traditions et Folklore en Wallonie - Noir dessin production
•Les Objets de la vie domestique. Ustensiles en fer de la cuisine et du foyer des origines au XIX s. de Raymond Lecoq

Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Principe d’analyse scientifique. Objets civils domestiques. Vocabulaire typologique. Du Ministère de la culture, Paris, 1984.